samedi 26 juin 2010

L'ange vain

Ils se prénomment tous deux Nicolas mais là où le premier, en son noir destin, se vautrait dans la fange saumâtre du cloaque de l'équipe de France au bout d'une Afrique qu'il vénère comme beaucoup d'Antillais, l'autre, chevalier blanc du sport français,  a participé à l'écriture d'une des plus belles page de la  légende du sport à l'issue d'un match d'anthologie du tournoi de Wimbledon, temple et berceau du tennis. Nicolas Anelka,  le banlieusard de Trappes, a honteusement profité et abusé de sa notoriété et de la renommée de l'événement auquel il participait pour mettre en avant les pires monstruosités que le football moderne a engendrées et déclencher la plus grave crise du football français. Une semaine plus tard, le provincial d'Angers  Nicolas Mahut, à l'occasion d'un banal premier tour des Internationaux de Grande-Bretagne face au géant américain John Isner (tout aussi héroïque) , est devenu un héros en disputant une rencontre mémorable qu'il perdit.  Le discret tennisman français (150ème mondial)  a prouvé tout au long des 11 heures et 5 minutes que dura ce match record qu'on pouvait faire du sport de très haut niveau et aller bien au delà de ses forces et de son courage pour tenter de gagner sans insulter son adversaire, l'arbitre ou le public, simuler une blessure au moindre coup de vent ou accuser la terre entière à la première balle litigieuse. Quel enjeu un joueur à la mentalité de footballeur français aurait pu trouver dans ce match ? Une place au deuxième tour du tournoi ,  25 000 euros minimum et la perspective de se faire torcher en 8èmes de finale par Rafaël Nadal. Mahut lui n'y a vu qu'un nouveau défi après avoir difficilement décroché sa place dans le tableau final en passant par les qualifications. Un challenge à relever face à un géant de 2m06 qui balance des services à 240 km/h. Qu'est-ce qui a empêché Mahut de laisser filer alors que lui et son adversaire avait déjà fait exploser toutes les pendules du All England Club ? L'amour de son sport, le respect du public et surtout  la fierté du champion qui ne renonce jamais. Grâce à cet exploit, Nicolas Mahut et John Isner sont devenus de véritables références du tennis et du sport moderne. Tout le monde oubliera qui a gagné leur match mais on se souviendra toujours du nom de ces deux valeureux conquérants du bout de la nuit. Thierry Henry, un soir de novembre, aurait pu rejoindre la glorieuse confrérie de ces chevaliers de l'inutile. Il aurait suffi qu'il reconnaisse immédiatement sa faute, cette tache indélébile qui fut la première à maculer le maillot frappé du coq.